Quartier de la Californie : la Petite Russie cannoise

Cannes est devenue l’une des plus célèbres corniches du littoral méditerranéen. Cette cité du cinéma que l’on connaît aujourd’hui n’était pourtant qu’un petit village de pêcheurs il y a une poignée d’années. Retour sur ses origines.

Le tournant

Les historiens ont mis en évidence la présence de vie humaine dès le Néolithique mais aussi à l’âge de Fer. Les Oxybiens du peuple transalpin Ligure auraient été les premiers colons. Ils se seraient alors installés sur un promontoire où se dresse l’actuel Suquet. Cannes aurait été ensuite occupé par les Romains. Au Moyen-Age, après les attaques des barbares et des Sarrasins, le Comte de Provence fait don des droits de la ville à la famille Rodoard. Cannes est alors un village fortifié et perché.

Il faudra attendre le XIX° siècle pour qu’elle connaisse un essor. Plus particulièrement en 1834. Lord Henry Brougham et Vaux stoppé à la frontière italienne en raison d’une épidémie de choléra, rebrousse chemin et fait une halte à Cannes. Séduit, il y fait construire la Villa Eléonore. Usant de ses relations, il obtient des subventions pour l’aménagement du Port et fait construire le Quai Saint Pierre. Petit à petit, c’est toute l’aristocratie britannique qui vient en villégiature sur le littoral cannois.

Les Anglais ne sont pas les seuls à faire de ce village une station climatique et balnéaire en vogue à l’époque. Le modeste port de pêcheurs connait aussi un essor fulgurant grâce aux Russes. Focus sur l’un des quartiers de Cannes : la petite Russie.

La petite Russie

Eugène-François Tripet fils du consul de France à Moscou rencontre et épouse une riche héritière, Alexandra Feodorovna Skrypitzine, fille du conseiller privé du tsar Nicolas Ier. De voyage En Italie, ils s’arrêtent à Cannes et tombent sous le charme. Ils s’y installent et font construire la villa Alexandra de type russo-mauresque, dont rien ne subsiste aujourd’hui.

Dès lors, ils font connaître Cannes aux élites russes européanisées. Durant la Belle Epoque, c’est une partie de l’aristocratie Russe qui y séjourne. Mais c’est la tsarine Maria Alexandrovna épouse d’Alexandre II, qui en séjournant à Cannes en 1879 pour des raisons de santé marque un tournant pour la communauté russe mais surtout pour la renommée de Cannes. En effet, la ville est sous les feux des projecteurs. Elle est choisie parmi tant d’autres comme cité de convalescence mais surtout c’est la première fois, qu’une ville accueille une souveraine étrangère. Sa présence attire la haute aristocratie russe mais aussi l’élite de l’Empire sans oublier les hauts fonctionnaires et les militaires venus lui rendre visite.

Ce village devient une station climatique et balnéaire en vogue où nombreux sont ceux qui font particulièrement construire leur résidence de villégiature à l’Est. Le quartier russe appelé quartier de la Californie – les Gabres, Château Saint-Michel, Palm-Beach, Super-Cannes – compte de nombreuses demeures et monuments qui témoignent de cette présence russe.

Retour sur un quartier qui a édifié de somptueuses bâtisses secondaires hivernales entre autres. Retour sur quelques-unes des traces laissées par ces ancêtres de prestige russes. Entre autres, l’église orthodoxe russe Saint-Michel-Archange dédiée au Saint Patron du grand-duc Michel Mikhaïlovitch de Russie se situe sur le boulevard Alexandre III. Le Parc Alexandra avec sa chapelle en hommage à Alexandra Feodorovna Skrypitzine est un bijou architectural. Pour l’anecdote, c’est Eugène Tripet qui au décès de sa femme la fit construire et ce, dans l’axe d’une voie qu’il avait fait tracer depuis l’entrée de leur domaine jusqu’aux terrains contigus au nouveau chemin de fer. Leurs enfants en firent don à la ville de Cannes, charge à elle d’en assurer l’entretien et de perpétuer le souvenir de la famille.

En parallèle, l’Hôtel des voyageurs construit en 1870 devenu tour à tour Hôtel des Anges, Hôtel Regina est devenu Maison des Russes – maison de retraite – grâce à la Fondation Internationale Tolstoï créée par la comtesse Alexandre Tolstoï.

 

La communauté russe est présente dans le paysage français dès le XVIII° siècle. Mais c’est par le plus grand des hasards, par le fruit d’une circonstance fortuite, que cette communauté d’élite s’installe à Cannes. C’est grâce à son implication dans la vie économique, politique mais aussi culturelle, que Cannes est devenue un lieu de séjour hivernal mais aussi une terre d’accueil pour de nombreux réfugiés suite à la Révolution bolchevique. L’histoire de la ville de Cannes est indissociable et s’intègre à celle des Russes.

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